N°10 / À bas les masques !

Identités rêvées et identités révélées dans le théâtre d’Edmond Rostand

Marion Sautereau

Résumé

Dans le théâtre de Rostand, le motif de la quête identitaire est récurrent. Il s’illustre par un schéma d’intrigue et de construction spécifique des personnages. Ces derniers se caractérisent d’abord par leur ethos. Ils se construisent une image idéalisée, une projection rêvée d’eux-mêmes. Leurs actes et leurs paroles visent dès lors à incarner ce fantasme identitaire. Pour ce faire, ils ont recours à des jeux de masques. D’un côté, les personnages s’associent dans des complots. Ils espèrent ainsi parvenir à leurs fins et combler l’écart existant entre leur être et leur ethos. De l’autre côté, c’est aussi l’occasion pour eux de changer d’apparences et de se déguiser pour mieux laisser transparaître leur véritable identité. Cependant, la quête de tous les personnages rostandiens ne se solde pas par un succès. Si certains parviennent grâce aux masques à s’élever et à atteindre leur rêve identitaire, d’autres ne peuvent que constater la vanité de leur existence.

Mots-clés

Plan de l'article

Télécharger l'article

L’œuvre dramatique d’Edmond Rostand se présente comme un point de rencontre privilégié entre deux notions éminemment théâtrales : l’identité et le masque. Le caché et le montré, l’être et le paraître, l’incarnation et la représentation, sous-tendent ensemble les dynamiques des pièces rostandiennes. D’une part, la récurrence des intrigues reposant sur des quêtes identitaires fait de celles-ci un système dramaturgique à part entière. Les personnages rostandiens aspirent en effet à se révéler à eux-mêmes et aux autres. D’autre part, le théâtre lui-même offre le moyen nécessaire à la mise en œuvre de ces quêtes par le biais des jeux de masquage et de leur inévitable conséquence, les démasquements. Si a priori l’acte de masquage peut sembler paradoxal ici, puisque révéler et cacher sont en soi antinomiques, le démasquement qui en découle est pourtant la condition sine qua non de la découverte de soi pour les personnages. S’interroger sur l’identité et le masque chez Rostand revient donc à mettre en lumière le mécanisme de cause à effets dont ils sont les fondements. En l’occurrence, les personnages s’avèrent désireux d’incarner un être idéalisé, qui n’est en fait qu’une projection identitaire, un ethos admirable. Parce qu’ils sont faillibles, fondamentalement humains souvent plus qu’héroïques, ces personnages portent cet ethos comme un masque. Ils jouent, feintent et se déguisent en espérant le rendre réel. Mais l’idéal est intrinsèquement inatteignable, et le masque inexorablement provisoire. Aussi, les créatures rostandiennes font-elles finalement face à elles-mêmes, à leur identité profonde, une fois celle-ci révélée par la chute du masque. Nous concentrerons notre étude sur cinq pièces. Cyrano de Bergerac, L’Aiglon et Chantecler occupent une place de choix dans l’œuvre rostandienne. Nous les comparerons occasionnellement à une pièce antérieure - Les Romanesques1, créée en 1894, car elle contient les prémisses des questionnements qui jalonnent en outre Cyrano – ainsi qu’à La Dernière Nuit de Don Juan2 – parue à titre posthume – car elle fait écho à L’Aiglon sur plusieurs points. 

 

1. Des identités rêvées 

L’ethos, dans la rhétorique antique, désigne l’image que le locuteur donne de lui par son discours. Selon Aristote, tel qu’il le présente dans sa Rhétorique, l’ethos s’appuie sur le discours, le comportement et les mœurs de l’orateur, pour produire un effet sur le public. Le Littré rattache justement la notion à celle de « mœurs », ἦθος en grec. Dominique Maingueneau en précise les aspects :

La rhétorique antique entendait par èthè les propriétés que se confèrent implicitement les orateurs à travers leur manière de dire : non pas ce qu’ils disent explicitement sur eux-mêmes, mais la personnalité qu’ils montrent à travers leur façon de s’exprimer. Aristote avait esquissé une typologie, distinguant la « phronèsis » (avoir l’air pondéré), l’ « eunoia » (donner une image agréable de soi), l’ « aretè » (se présenter comme un homme simple et sincère3).

C’est pourquoi, dans le cadre du théâtre rostandien, nous appellerons donc « ethos » l’image valorisante que les personnages veulent donner d’eux-mêmes ou l’image qu’autrui leur attribue. Il s’agit dès lors d’une projection identitaire, d’une identité qui est rêvée et qui répond au « paradoxe d’un sujet parlant dont nous ne savons rien au départ que son propre discours » combiné à la « distance entre ce discours et ce que le spectateur apprend par d’autres bouches » de sorte à générer une « situation d’étrangeté qui met en péril le principe de l’identité4  ». Or, dans le premier tome de Lire le théâtre5, Anne Ubersfled indique que les différents outils de caractérisation des personnages dramatiques sont précisément leur individualité, leurs discours, les référents historico-sociaux qu’ils incarnent et leurs fonctions oxymorique et métonymique. C’est à tout cela que se rattache finalement l’ethos des créatures rostandiennes.


À ce titre, le cas de Cyrano est éloquent. L’image qu’il vise à renvoyer est celle d’un poète bretteur, politiquement indépendant, philosophiquement libre et sentimentalement romanesque. Les valeurs que le Gascon revendique face au fâcheux et à Valvert au premier acte, et qui résonnent à l’acte suivant face à De Guiche puis dans la tirade des « Non, merci », attestent du fait qu’il refuse toute contrainte qu’il ne s’impose à lui-même : « Moi, c’est moralement que j’ai mes élégances. […] / Je fais, en traversant les groupes et les ronds, / Sonner les vérités comme des éperons6. » De même, au quatrième acte, Cyrano fait part aux cadets affamés de ses fantasmes identitaires : 

Oui, la pointe, le mot ! / Et je voudrais mourir, un soir, sous un ciel rose, / En faisant un bon mot, pour une belle cause ! / - Oh ! frappé par la seule arme noble qui soit, / Et par un ennemi qu’on sait digne de soi, / Sur un gazon de gloire et loin d’un lit de fièvres, / Tomber la pointe au cœur en même temps qu’aux lèvres7 !

Or, le dernier acte confirme bien qu’il ne s’agit que d’une projection. La réalité est toute autre, et Cyrano le constate avec regret : « "D’un coup d’épée, / Frappé par un héros, tomber la pointe au cœur !"… / - Oui, je disais cela !... Le destin est railleur !... / Et voilà que je suis tué dans une embûche, / Par-derrière, par un laquais, d’un coup de bûche8. » En effet, l’ethos, par essence, n’est qu’une image. Et le principal obstacle qui fragilise les contours de celle de Cyrano est ce nez « qui d’un quart d’heure en tous lieux [le] précède9. » Jean-Baptiste Manuel, dans son ouvrage sur Rostand, explique ainsi que « Le nez, c’est l’obstacle, le masque qui empêche d’être reconnu pour ce que l’on est. Le nez, c’est la peur panique de n’être pas institué en tant qu’individu10. » De la même façon, Pierre Citti, dans sa préface de l’édition de poche de la pièce, souligne que « toute chair est un masque pour l’âme, et comme le nez de Pinocchio, plus il défigure et plus il la révèle – ici en la contraignant au sublime11. » Dès lors, pour couvrir son nez, cette faille, ce masque involontaire derrière lequel Cyrano ne se reconnaît pas, le Gascon doit revêtir d’autres masques, volontaires cette fois car davantage conformes à ses idéaux. Mais le Gascon n’est pas un cas isolé dans l’œuvre rostandienne. Effectivement, Chantecler se trouve lui aussi en proie à une tension interne entre son identité et la façon dont il se rêve. L’ethos qu’il revendique, d’abord pour lui-même avant de l’exposer au grand jour, est celui d’une créature privilégiée par la nature, dont le don est de faire lever le soleil. Chantecler s’idéalise et se projette en faiseur d’aurore. « La Terre parle en moi comme dans une conque ; / Et je deviens, cessant d’être un oiseau quelconque, / Le porte-voix en quelque sorte officiel / Par quoi le cri du sol s’échappe vers le ciel12 ! » se raconte-t-il devant la Faisane. Cependant, là encore, l’ethos est fragilisé par la réalité. Chantecler n’est qu’un coq. Avec ou sans lui, l’aube vient inexorablement. Les masques, ici aussi, doivent intervenir pour que la quête identitaire du personnage puisse aboutir, tout comme pour les protagonistes des Romanesques. En effet, dans toute la première partie de la pièce, ils se rêvent « parangons d’amour aux types éternels13. »  L’image qu’ils projettent d’eux-mêmes s’appuie sur les illustres amants de Vérone dont l’histoire abreuve leurs fantasmes identitaires : « C’est pourquoi Juliette et Roméo c’est nous, / Et c’est pourquoi nous nous aimons comme des fous ! / Et je brave à la fois, malgré leur haine aiguë, / Pasquinot-Capulet, Bergamin-Montaiguë14 ! » Et pourtant, la pièce bascule lorsqu’ils réalisent que leur amour est des plus communs. Les jeux de masques interviennent là encore pour combler l’écart entre l’identité rêvée et la réalité.


Nous retrouvons le même schéma avec l’Aiglon. Le Duc autrichien, blond et pâle, se rêve digne fils de Napoléon. D’un côté, Franz tente de bâtir son ethos. Il « cultive tout ce qu’il a de français, et le dévoile au grand jour de manière spectaculaire dès qu’il prend conscience de son héritage paternel15 » décrit Sylvain Ledda dans sa présentation de la pièce. De nombreuses scènes viennent étayer cette idée. Citons, en outre, le dialogue avec Prokesch dans lequel Franz confie lire tous les livres se référant à son père, la leçon d’histoire donnée à ses deux professeurs, la revendication de son territoire devant son grand-père, la dispute qui suit directement celle-ci ou encore celle avec Marie-Louise au cours desquelles le Duc de Reichstadt fait appel aux aigles d’or et au sang corse pour contrer les aigles noirs et le sang autrichien. Dès lors, l’identité rêvée par l’Aiglon se confronte à la réalité. La blondeur est à Franz ce que le nez est à Cyrano : un masque involontaire, qui doit être à son tour caché sous des masques volontaires pour espérer incarner son ethos, et le transformer, de ce fait, en identité. 


Bien qu’il s’agisse d’une pièce inachevée, La Dernière Nuit de Don Juan repose sur un principe similaire. Don Juan témoigne d’une part de la même volonté que les autres personnages évoqués de se façonner un ethos admirable. Il rêve d’être un mythe, une légende. Il se dépeint comme « Le seul héros qu’admire au fond l’humanité16 ! » Ainsi, Madeleine Roussel dans son étude de la pièce précise que : 

Don Juan, non content d’apparaître comme un héros littéraire, veut17 en être un ; il s’applique à bien jouer son rôle et à donner à son existence harmonieuse unité et achèvement esthétique […]. Le héros veut […] aller jusqu’au bout de son destin, jusqu’à la damnation spectaculaire qui est, pour le mythe qu’il incarne, une apothéose à rebours18.

Mais cette image n’est qu’un vide, plus encore sans doute que celle de Cyrano, Chantecler ou le Duc de Reichstadt, car l’identité même de Don Juan est sans fondement. Il ne s’agit pas d’un simple écart entre son être et son ethos qui l’empêcherait d’incarner ce qu’il souhaite. Don Juan est sa faille, il est son propre obstacle, et ses masques sont aussi vains que lui-même. « Tu n’as rien vu ! Tu n’as rien su ! Tu n’as rien eu19 ! » le déconstruit le Diable. « Je t’emporte, dupe, humilié, modeste20… » ajoute-t-il. « Car tu n’es qu’une angoisse ! / Une angoisse malgré l’orgueil que tu cabras21 » conclut l’Ombre blanche. Transformé en marionnette par le Diable, Don Juan se réduit à la matérialisation de son antonomase. Son identité se résume à un masque, ou une poupée de guignol, dans la peau de qui n’importe quel séducteur peut se glisser. 

2. Identités masquées

Par définition, le masque est un objet recouvrant et représentant parfois tout ou partie du visage, qui est porté dans diverses occasions de la vie sociale. On le porte, par exemple, pour se déguiser ou se dissimuler, pour représenter un rôle (comme au théâtre) ou incarner le sacré (dans les cérémonies religieuses). Par ailleurs, on peut désigner par « masque » le visage considéré du point de vue de sa morphologie ou de son apparence, de son expressivité ou de ce qu'il exprime de la personnalité de quelqu'un (état physique ou émotionnel, caractéristique d'un personnage, d'un type de personnage ou de personnalité). En ce sens, nous rassemblons sous la notion de « masques » non seulement des éléments d’ordre pratique qui permettent de se déguiser ou de se cacher (travestissements),  mais aussi les procédés qui ont trait au mensonge et au subterfuge. En somme, le masque permet aux personnages de paraître quelqu’un d’autre ou de devenir quelqu’un d’autre. Il constitue en ce sens à la fois la manifestation concrète de l’ethos, cette identité rêvée, et le meilleur moyen trouvé par les personnages de s’en rapprocher. Ces derniers, êtres de papier sans psyché propre comme nous le rappelle Anne Ubersfeld22, sont cependant construits à partir de la tension entre les notions d’individu, d’âme et de masque. En ce sens, Rostand prend appui sur  ses prédécesseurs dix-neuvièmistes qui jouaient de l’ambiguïté entre personne et personnage, comme le rappelle George Zaragoza dans Le Personnage de théâtre23. C’est pourquoi les jeux de dupes sont nombreux chez Rostand et sont mis en place à différents niveaux. 


En premier lieu, à l’échelle de l’intrigue, les masques prennent la forme de complots. Dans Cyrano de Bergerac, par exemple, ces complots sont d’ordre amoureux. 

Christian et Cyrano, pour séduire Roxane lors de la scène du balcon dans le troisième acte s’allient. Le pacte est scellé à l’acte précédent lorsque les deux jeunes hommes se rencontrent : « Cyrano : Roxane n’aura pas de désillusions ! / Dis, veux-tu qu’à nous deux nous la séduisions ? / Veux-tu sentir passer, de mon pourpoint de buffle / Dans ton pourpoint brodé, l’âme que je t’insuffle24!... » Notons que Cyrano porte de fait le masque de Christian et avec la complicité de ce dernier. 


En parallèle, dans Les Romanesques, les deux enfants sont de connivence pour duper leurs parents. Ils se retrouvent en cachette sur le mur qui sépare leur jardin pour s’aimer. Dans un même temps, les pères s’allient pour se jouer de leurs enfants et renforcer l’amour que Sylvette et Percinet se portent. Ils se masquent tels deux vieux ennemis. Ce complot est explicité par cet échange : 

Bergamin : Brusquons le dénoûment / Se frottant les mains / Ha ! ha ! tous les deux veufs, et pères mêmement, / Moi, d’un fils qu’une mère un peu trop romanesque / Appela Percinet… / Pasquinot : Oui, c’est un nom grotesque. / Bergamin : Toi, d’un tendron rêveur, Sylvette, âme d’azur ! / Quel était notre but, le seul ? / Pasquinot : Ôter ce mur. / Bergamin : Pour vivre ensemble… / Pasquinot : Et fondre en une nos deux terres25.

Outre les enjeux amoureux, on relève des jeux de masques davantage politisés dans L’Aiglon et Chantecler. Dans la première pièce, Metternich tire les ficelles. « Ah ! mais c’est qu’il me sert à diriger la France, / Mon petit colonel ! Car de sa boîte – cric ! - / Je le sors aussitôt qu’oubliant Metternich, / On penche à gauche, et – crac ! – dès qu’on revient à droite, / Je rentre mon petit colonel dans sa boîte26 » explique-t-il à Gentz au premier acte. Cependant, les Bonapartistes rétorquent au quatrième acte. Metternich l’apprend par Sedlinsky : « Metternich à Sedlinsky : Un complot, dites-vous ? / Sedlinsky : Pour le Duc, dans ce bal27. » C’est ainsi que Franz se retrouve exfiltré du bal pour se rendre à Wagram, première étape de son périple pour regagner la France. Pour finir, dans la dernière pièce jouée de Rostand, le Merle dénonce les masques des Nocturnes qui orchestrent un complot contre Chantecler : « Ils veulent – l’éclairage étant trop fort pour eux - / Faire couper… / Chantecler : Quoi donc ? / Le Merle : Le compteur ! / Chantecler : Le ?... / Le Merle : Ta gorge28 ! » Mais certains oiseaux dans l’entourage même de Chantecler revêtent le masques du complot comme le montre le double jeu du Dindon : 

Le Chat : Et même il y a, noirs veilleurs taciturnes, / Quelques oiseaux du jour qui sont pour les Nocturnes ! / Le Dindon, s’avançant au milieu d’un groupe furtif qui feignait seulement de dormir dans la basse-cour : C’est ce soir, chers yeux ronds ? Vous irez ? / Les Chats-Huants : Nous irons29 !

En l’occurrence, la conjuration se concrétise par l’intervention, lors de la réception chez la Pintade, d’un Pile-Blanc, coq de combat, qui dissimule derrière ses pattes des lames censées vaincre Chantecler. De ce fait, le masque du complot s’accompagne de jeux de costumes et de déguisements. Dans son Esthétique de l’identité dans le théâtre français, Georges Forestier témoigne de ces corrélations :

Doter une personnage d’un déguisement conscient, c’est, en effet, soit lui faire simplement affirmer qu’il est un autre (simple dissimulation d’identité) ; soit le faire paraître physiquement déguisé (déguisement magique, costume, barbe) ; soit enfin lui faire montrer qu’il est déguisé en lui faisant cacher son visage (masque, voile, ou casque30).

Les identités se dissimulent et se brouillent donc aussi matériellement. En outre, dans La Dernière Nuit de Don Juan, le Diable, d’une part, est costumé en montreur de marionnettes pour appâter le séducteur, tandis que, d’autre part, il s’appuie sur les mille-et-trois ombres masquées pour venir à bout de Don Juan. Dans L’Aiglon, les Bonapartistes profitent du bal costumé organisé par Metternich pour mettre leur plan à exécution. Ainsi, la Comtesse Camerata se retrouve déguisée en Duc de Reichstadt pendant que ce dernier se dissimule sous le manteau de Gentz. « Elle [la Comtesse] a sous son manteau ton habit blanc […] / Elle te ressemblait, déjà, de silhouette, / Mais depuis qu’elle a teint en blond ses cheveux noirs, / Prince, elle te ressemble à tromper les miroirs31! » explique Fanny à Franz. Et d’ajouter : « Donc, pendant qu’on jouera, / Elle montre, à gauche, la porte du petit théâtre / là, Michel et Christine, / Tu changes de manteau, vite, avec ta cousine… / Le Duc, comprenant : Je me masque32. » Ces masques sont motivés par deux objectifs parmi ceux énumérés dans Esthétique de l’identité de Georges Forestier, à savoir la « fuite » pour le Duc et la « délivrance » pour les bonapartistes.  


De leurs côtés, les auxiliaires des complots amoureux ne sont pas en reste. Cyrano dissimule sa blessure sous un large feutre au dernier acte, se donnant l’occasion ultime de lire la lettre d’adieu qu’il a écrite au nom de Christian. Deux actes plus tôt, il se cachait déjà sous sa cape et son chapeau sous le balcon de Roxane pour lui faire croire qu’il était Christian. Dans les deux cas, cela rejoint les motivations du déguisement que sont l’« approche33 » et la « conquête » évoquées par Georges Forestier. Puis, il réitérait, cette fois face à De Guiche – lui-même masqué d’ailleurs –pour le ralentir et permettre à Roxane d’épouser le baron. En parallèle, le spadassin Straforel, dans Les Romanesques, se change en brigand lors du faux enlèvement de Sylvette, donnant l’occasion aux quatre comploteurs, parents et enfants, d’accepter le mariage qu’ils désirent tous en secret. À nouveau lorsque le mariage est remis en question, Straforel se déguise en noble, sous le costume d’un maçon, pour faire comprendre à Sylvette que ses rêves romanesques sont trop loin de son identité véritable. « Vous me prenez pour un maçon ? Exquis ! / C’est exquis ! – Sachez donc que je suis le marquis / D’Astafiorquercita, fol esprit, cœur malade, / Qui cherche à pimenter l’existence trop fade, / Et voyage, façon de chevalier errant / Auquel est un rêveur, un poète, adhérent34 ! » s’exclame-t-il au dernier acte. 


Il est donc intéressant de constater à quel point les personnages rostandiens sont des porteurs de masques, et que ceci est directement lié à leur quête identitaire. Tantôt, un seul masque suffit pour jouer le mystère, comme pour les invités du bal orchestré par Metternich ou le Diable chez Don Juan. Tantôt, le masque est double car le physique des personnages représente déjà pour eux un masque, à masquer donc. « Le nez de Cyrano, ce complexe au milieu de sa figure apparaît donc comme un véritable masque qui ne peut être ôté35 » écrit Philippe Bulinge dans un article étudiant la pièce. « La séduction de Don Juan est un masque qu’il faut lui arracher pour atteindre sa réalité ; elle est une apparence brillante dont les autres – et le héros lui-même – sont victimes36 » analyse encore Madeleine Roussel. À son tour le Duc de Reichstadt s’écrie : « - Père, il faut que tu dormes / Tranquille, car j’ai tout, - même tes uniformes ! / Oui, j’ai l’air de porter un uniforme blanc. / Eh bien ! ce n’est pas vrai, c’est faux : je fais semblant37


Jeux de masques sur jeux de masques, notons finalement que la superposition ne s’arrête pas là. Car sur scène, les comédiens eux-mêmes, pour devenir les personnages rostandiens, doivent se trouver masqués. L’incarnation même de ces identités, donc, induit le masquage. Sans nez, comment distinguer Cyrano d’un simple coup d’œil ? « Car au théâtre, collé sur le visage familier de Coquelin, Le Bargy, Jean Piat et Depardieu, ce nez est un masque38 » témoigne Pierre Citti. Et les multiples adaptations de la pièce sur scène comme au cinéma ne dérogent pas à la règle39. Citons de façon très contemporaine le masque porté par Stéphane Dauch de la compagnie du Grenier de Babouchka, qui a reçu le prix du Festival d’Avignon 2014 de la révélation masculine dans le rôle-titre dans l’adaptation de Cyrano par Jean-Philippe Daguerre. Dans ce spectacle joué depuis dix ans et installé au théâtre Ranelagh à Paris, le masque du protagoniste se situe à mi-chemin entre le nez postiche et le loup. Ceci renforce donc le caractère mystérieux et caché du personnage, au-delà de son seul nez particulier. De même, les versions cinématographiques et scéniques d’Edmond, orchestrées par Alexis Michalik, réactivent le lien entre le rôle de Cyrano, l’acteur Coquelin et le masque grotesque. En effet, alors qu’il présente au comédien la pièce qui n’est pas encore écrite, le personnage de Rostand pose les yeux sur ce masque au long nez accroché à un mur et improvise à partir de lui le rôle cyranien censé convaincre Coquelin. Dans un même ordre d’idée, le soir de la première, alors qu’il se prépare en loge, le personnage de Coquelin se trouve ridicule avec son nez postiche, et il n’ose se rendre sur scène que grâce aux encouragements du personnage de Maria Legault chargée du rôle de Roxane.  Il en va de même avec Chantecler car dans cette pièce l’ampleur du masquage des comédiens est encore plus conséquente. « En fait, cette pièce était et reste injouable. C’était une gageure théâtrale impossible à soutenir […].  Ce titre, on le lira toujours ; on le représentera rarement40 » constate en ce sens Philippe Bulinge dans sa présentation de la pièce. La vision scénographique de Rostand, qui aspire à l’incarnation parfaite des oiseaux de basse-cour par des hommes, est démesurée. En témoignent non seulement ses propres croquis, mais aussi les photographies de l’époque. Le poids des costumes, les positions des comédiens à l’intérieur des armatures, et la difficulté à interpréter leurs textes, cachés sous les masques animaliers, sont évoqués de façon récurrente dans les journaux et entrevues. Triple masque donc pour les comédiens, aspirant à incarner des personnages rostandiens, qui portent déjà sur eux des masques involontaires, et y ajoutent des masques nécessaires à l’expression de leur identité. Or, si comme le pense Jean Starobinsky « Le caché est l’autre côté d’une présence41 », le masquage porte fondamentalement en lui l’identité démasquée.

3. Identités révélées 

Nous avons jusqu’ici établi que, tout d’abord, les personnages rostandiens étaient en quête de leur identité, et que, d’autre part, ils exploitaient de multiples masques. Nous avons défini que la quête aspirait à révéler l’être qui se cherchait, à lui-même et aux autres. À l’inverse, le masque tend à cacher celui qui le porte. Cependant, nous pouvons observer que ce paradoxe n’est pas un obstacle à la quête identitaire, comme on pourrait s’y attendre. Le démasquement apparaît comme l’autre côté du masquage, l’identité comme l’autre côté du masque. « Ainsi, un va-et-vient, un rythme s’établit entre la vérité intérieure et l’illusion ; le pôle de la sincérité se déplace sans cesse, il est tantôt à la surface du masque, tantôt caché en-dessous42», énonce Georges Buraud. Ce dernier s’interroge encore à ce sujet. Qu’est-ce que le masque, écrit-il, « sinon une allusion à un être qui se cache et veut apparaître sous un aspect de son choix à la fois mensonger et sincère, mensonger parce que différent, sincère parce que ce visage nouveau est en même temps un aveu et une délivrance ? » La véritable question n’est donc pas de savoir si, chez Rostand, une identité est oui ou non révélée lors du démasquement, si le masque a oui ou non été efficace au cours de la quête, mais bel et bien si cette identité finalement mise à nue convient ou non aux personnages qui la découvrent.  


Parmi les personnages rostandiens, nous pouvons distinguer deux groupes : ceux dont l’identité révélée s’est rapprochée de leur idéal – ou bien dont l’idéal s’est adapté à la réalité – et ceux qui ont purement et simplement échoué à devenir ce qu’ils espéraient. Le premier groupe de personnages se trouve donc apte à s’élever, tandis que le second en est incapable, bien que les uns comme les autres cherchent à se caractériser tout au long de la pièce.

Via le masque, les personnages rostandiens aspirent à se réaliser en tant que personnes, car seul le masquage – qui induit le démasquement – peut conduire à cette réalisation. 

En l'occurrence, notons que Franz et Don Juan rivalisent dans l’échec. A contrario, les Romanesques, Cyrano et Chantecler réussissent à s’élever. Ce que partagent ces derniers se traduit en un mot : l’action. Ils portent en eux un goût de l’effort, une motivation suffisante, qui les pousse à agir, et donc à se créer. Chantecler se dépeint ainsi aux couleurs de l’action, de la vie et de la gaieté : « Soyons gai d’être Coq ! […] Je suis beau. Je suis fier. Je marche. Je m’arrête. / J’esquisse une gambade ou de brusques écarts ! […] / À demain les soucis ! Mâchonnons un brin d’orge ! / Soyons gai43 ! » Cyrano lui ressemble. Citons en outre Philippe Bulinge dont l’étude de la pièce rend parfaitement compte des éléments qui nous intéressent ici : « Le Cyrano masqué est l’expression de la force interne d’un Cyrano intime qui s’invente un personnage meilleur et le rend vivant par ses actes44. » Alors que Le Bret le gronde d’avoir dépensé tout son argent à rembourser le public du théâtre - « Jeter ce sac, quelle sottise ! » - c’est bien l’action que Cyrano revendique en rétorquant « Mais quel geste45 !... » À nouveau, reprenons les mots de Bulinge : « Paraître est le moteur d’une profonde motivation : se rendre admirable, c’est se rendre digne d’admiration. Et l’admiration voulue n’est pas la fascination hystérique d’une foule qui se laisse prendre à ce qui brille, mais l’identification à un héros, celui qui agit46. » De fait, le panache est le squelette de la personnalité que Cyrano a construite. C’est une identité révélée « sublime » et « généreuse » selon les mots de Roxane. 

De leur côté, plutôt que de s’élever vers leur idéal, Sylvette et Percinet s’accommodent d’une identité réaliste. Alors qu’au deuxième acte des Romanesques, Sylvette déplorait de « [rentrer] dans le rang banal des jeunes filles47 » et Percinet de se faire le « bon petit fiancé des familles48 » parce qu’ils craignaient de ne pouvoir se plaire ainsi, ils réalisent au dernier acte que cette identité est celle qui leur convient le mieux. Au lieu de s’offusquer, ils déduisent ensemble : 

Sylvette : Vois-tu, la poésie est au cœur des amants : / Elle n’émane pas des seuls événements. / […] Percinet : Car elle peut broder, lorsqu’elle aime, notre âme, / De véritables fleurs sur une fausse trame. / […] Sylvette : La poésie, amour, mais nous fûmes des fous / De la chercher ailleurs lorsqu’elle était en nous49 !

Percinet et sa fiancée renoncent à jouer le « cher et divin drame50 », comprenant qu’il ne peut être qu’un masque.

Enfin, voici comment Madeleine Roussel caractérise Don Juan, avec une sévérité éclairante pour notre étude : 

Dans le domaine de l’amour où il se croyait maître, le héros de La Dernière Nuit… accumule donc les échecs. Il n’a pas connu l’épanouissement qu’apporte un sentiment profond, satisfait ou déçu ; en traitant l’amour comme un plaisir, il a oublié d’y chercher le bonheur. La révélation de son ignorance réelle des femmes, et de leur supériorité sur lui, le fait apparaître comme un faux grand esprit, prétentieux et ridicule, bien dépouillé des prestiges qui faisaient de lui un fascinant modèle. Mais en devenant ridicule, il ne cesse pas d’être condamnable ; s’il n’a pas séduit les femmes comme il s’en vantait, il n’en avait pas moins l’intention constante et délibérée. Ainsi le séducteur démasqué apparaît tel que le voit Rostand, dans sa médiocre et sombre réalité : volontairement pervers et inconsciemment risible51.

 À cause de l’habitude qui est la sienne, Don Juan se condamne à ne jamais pouvoir incarner son ethos. Pire, il s’empêche de pouvoir ne serait-ce que lui ressembler. Yves Moraud remarque :

Il arrive qu’à force de se masquer et de se dédoubler, de travestir ses sentiments parmi d’autres qui cachent les leurs, de confondre le jeu avec la réalité ou plutôt de fuir la réalité dans le jeu, l’individu en vient à se dissoudre, à ne plus savoir quelle est son identité ni quelles sont ses raisons d’exister52

En effet, le masque de Don Juan, c’est la séduction. Son idéal, être une légende. Son identité véritable, le vide, ou comme le mentionne Polichinelle – double de Don Juan – la paillardise. 
Des enjeux similaires sont notables dans L’Aiglon. Franz sent en lui le poids de sa légende, celle du fils de Napoléon. Or, cette légende est « marquée par le sceau de la subjectivité : elle est le signe d’une profonde inadéquation entre la réalité des faits, la réalité du moment à vivre et vécu, et la réalité des rêves, des désirs d’un homme, lui-même dépositaire de la légende53. » Si plutôt que de se noyer dans son mythe, comme le fait Don Juan, le Duc conserve une certaine lucidité qui le rappelle au réel, il ne dispose pas, par sa faiblesse physique en tout premier lieu, de l’énergie et de la force d’un Cyrano ou d’un Chantecler. Gentz se prend à deviner en Franz « Quelqu’un qui souffre, au lieu de prendre / Le doux parti de vivre en prince jeune et tendre54. » Finalement, les mots de Marie-Louise au dernier acte sont intéressants à relever : « J’étais – est-ce ma faute ?- / Trop petite, à côté de vos rêves trop grands55 ! » Or, nous devons souligner la ressemblance physique entre Franz et sa mère, qui précisément l’empêche d’être le digne fils de Bonaparte. 

Ainsi, la question de l’identité et des masques chez Rostand laisse apparaître un schéma récurrent dans son œuvre. Les intrigues reposent sur des quêtes identitaires. Or, il n’y a pas chez Rostand de « scène de reconnaissance » dans laquelle un héros découvre ses véritables origines ou les véritables liens qu’il entretient avec tel ou tel autre personnage. Les protagonistes rostandiens connaissent leurs noms et savent d’où ils viennent. Ils n’ignorent pas leur individualité. Ce qu’ils cherchent, en revanche, c’est à se caractériser, à s’incarner. C’est pourquoi, ils visent un ethos établi par leurs idéaux, et cet objectif les poussent à l’action. Par conséquent, les personnages sont conduits à arborer différents masques pour se trouver eux-mêmes. Nous avons évoqué ici deux formes de masques, les complots – puisqu’ils servent l’intrigue et donc la quête identitaire – et les costumes – puisqu’ils consistent à présenter un autre visage, et donc une autre identité. Néanmoins, l’œuvre rostandienne regorge de jeux de masques de natures plus variées encore et dont les enjeux ne se limitent pas à l’échelle de la fiction théâtrale. 

 


Notes et références

Bibliographie

1) Corpus étudié

Rostand Edmond, Chantecler [1910], présentation par Philippe Bulinge, Paris, GF Flammarion, 2006.
Rostand Edmond, Cyrano de Bergerac [1897], Paris, Le livre de poche, « Le théâtre de poche », préface, notes et commentaires par Pierre Citti, 1990.
Rostand Edmond, La Dernière Nuit de Don Juan [1921], Paris, Eugène Fasquelles, 1921.
Rostand Edmond, L’Aiglon [1900], présentation par Sylvain Ledda, Paris, GF Flammarion, 2018.
Rostand Edmond, Les Romanesques [1894], Œuvres complètes illustrées, Paris, Pierre Lafitte et Cie, 1911.

2) Ouvrages critiques sur Rostand cités dans l’article 

Bulinge Philippe, « La Légende picturale napoléonienne dans L’Aiglon d’Edmond Rostand », 2002, [en ligne] http://www.edmond-rostand.com/legende.pdfconsulté en avril 2021.
Bulinge Philippe, « L’Héritage de La Samaritaine dans Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand », 1998, [en ligne] http://www.edmond-rostand.com/cyrano.PDFconsulté en avril 2021.
Manuel Jean-Baptiste, Edmond Rostand, Écrivain imaginaire, Anglet, Atlantica, 2003.
Roussel Madeleine, Une Œuvre ignorée d’Edmond Rostand : La Dernière Nuit de Don Juan, Académie des Sciences et des Lettres de Montpellier, 2005.

3) Ouvrages de critique théâtrale cités dans l’article

Ubersfeld Anne, Lire le théâtre I [1977], Paris, Belin, 1996.
Ubersfeld Anne, Lire le théâtre II, L’École du spectateur [1981], Paris, Belin, 1996.
Ubersfeld Anne, Lire le théâtre III, Le dialogue de théâtre, Paris, Belin, 1996.


4) Ouvrages et articles sur le thème des masques et de l’identité cités dans l’article

Buraud Georges, Les Masques [1948], Paris, Les Belles Lettres, «  Encre Marine », 2014.
Goffman Erving, La Mise en scène de la vie quotidienne, 1. La Présentation de soi, traduction par A. Accardo, Paris, Les Éditions de Minuit, 1973.
Maingueneau Dominique, Le Contexte de l’Œuvre littéraire, Énonciation, Écrivain, Société, Paris, Bordas, 1993.
Moraux Yves, Masques et jeux dans le théâtre comique en France entre 1685 et 1730, Lille, Atelier Reproduction des thèses, 1977.
Starobinski Jean, L’Œil vivant [1961], Paris, Gallimard, 1999.


1 Dans Les Romanesques, Rostand met en scène deux duos : d’un côté, les jeunes amoureux Sylvette et Percinet, de l’autre leurs pères respectifs, Pasquinot et Bergamin. Ces derniers, amis et voisins, cherchent à fondre leurs deux terres par le biais du mariage de leurs enfants. Mais conscients du caractère trop « romanesque » de ces jeunes gens incapables d’accepter un mariage banalement arrangé, les pères montent un stratagème. Ils font croire à leur profonde inimitié. Persuadés de braver les interdits, les enfants se rêvent en dignes héritiers de Roméo et Juliette et se retrouvent chaque nuit en cachette sur le mur qui sépare leurs jardins. L’intervention d’un spadassin nommé Straforel permettra tout à la fois de renforcer les secrets de chacun et de révéler les vérités. Successivement, les fiançailles se trouveront officialisées, puis rompues, et de nouveau désirées par les jeunes gens revenus de leurs fantasmes et prêts à embrasser la réalité. 

2 La Dernière Nuit de Don  Juan s’inscrit dans le prolongement direct de la pièce de Molière, puisqu’elle s’ouvre sur la descente en Enfer de Don Juan guidé par la Statue du Commandeur. Cependant, bon négociant, Don Juan obtient du Diable dix ans de vie supplémentaires en échange d’une multitude d’âmes corrompues par ses soins. La décennie écoulée, le Diable se présente d’abord au séducteur sous les traits d’un marionnettiste. Comprenant ce qui se joue, Don Juan fait le pari d’identifier chacune de ses mille-et-trois conquêtes qui apparaissent sous la forme d’ombres masquées invitées par le Diable. Mais il échouera de bout en bout. Le Diable le confrontera à son vide intérieur, l’absence de trace qu’il laissera sur le monde et surtout sur les femmes, et le condamnera à une métamorphose en marionnette, bien loin des épiques et glorieuses flammes infernales que le séducteur pensait mériter.

3 Dominique Maingueneau, Le Contexte de l’œuvre littéraire, énonciation, écrivain, société, Paris, Bordas, 1993, p. 137-138.

4  Anne Ubersfeld, Lire le théâtre III, Le dialogue de théâtre, Paris, Belin, 1996, p. 58.

5  Anne Ubersfeld, Lire le théâtre I [1977], Paris, Belin, 1996.

 Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac [1897], Paris, Le Livre de poche, « Le théâtre de poche », préface, notes et commentaires par Pierre Citti, 1990, p. 92. 

 Ibid., p. 257.

 Ibid., p. 343.

9  Ibid., p. 105.

10  Jean-Baptiste Manuel, Edmond Rostand, Écrivain imaginaire, Anglet, Atlantica, 2003, p. 105.

11 Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, op. cit., p. 30.

12  Edmond Rostand, Chantecler [1910], présentation par Philippe Bulinge, Paris, GF Flammarion, 2006, p. 168-169.

13 Edmond Rostand, Les Romanesques [1894], Œuvres complètes illustrées, Paris, Pierre Lafitte et Cie, 1911, p. 68.

14  Ibid., p. 5.

15 Edmond Rostand, L’Aiglon [1900], présentation par Sylvain Ledda, Paris, GF Flammarion, 2018, p. 15.

16  Ibid., p. 59.

17 La critique souligne.

18 Madeleine Roussel, Une œuvre ignorée d’Edmond Rostand : La Dernière Nuit de Don Juan, Académie des Sciences et des Lettres de Montpellier, 2005, p. 143. Roussel souligne « veut ».

19  Edmond Rostand, La Dernière Nuit de Don Juan, op. cit., p. 87.

20  Ibid., p. 93. 

21  Ibid., p. 112-113.

22 Anne Ubersfeld, Lire le théâtre I, op. cit. 

23 Georges Zaragoza, Le Personnage de théâtre, Paris, Armand Colin, 2006.

24 Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, op. cit., p. 179.

25 Edmond Rostand, Les Romanesques, op. cit., p. 20-21.

26  Edmond Rostand, L’Aiglon, op. cit., p. 66. 

27 Ibid., p. 258-259 

28  Edmond Rostand, Chantecler, op. cit., p. 200. 

29 Ibid., p. 131.

30 Georges Forestier, Esthétique de l’identité dans le théâtre français (1580-1680), Le Déguisement et ses avatars, Genève, Droz, 1988, p. 50.

31  Edmond Rostand, L’Aiglon, op. cit., p. 287. 

32 Ibid., p. 287.

33 Georges Forestier, Esthétique de l’identité dans le théâtre français, op. cit., p. 113.

34 Edmond Rostand, Les Romanesques, op. cit., p. 81.  

35 Philippe Bulinge, « L’Héritage de La Samaritaine dans Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand », 1998, [en ligne] http://www.edmond-rostand.com/cyrano.PDF,  consulté en avril 2021. 

36 Madeleine Roussel, Une Œuvre ignorée d’Edmond Rostand : La Dernière Nuit de Don Juan, Académie des Sciences et des Lettres de Montpellier, 2005, p. 152.

37 Edmond Rostand, L’Aiglon, op. cit., p. 217. L’uniforme blanc est littéralement son « costume » d’Autrichien. Or, il devient au quatrième acte plus théâtral encore en servant de « déguisement » à la Comtesse Camerata changée en Franz. Ce même masque passe donc de l’involontaire au volontaire selon le personnage qui le revêt.

38 Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, op. cit., p. 29.

39 Certaines représentations étendent le port du masque aux autres personnages, lorsque le nombre d’acteurs sur scène est inférieur au nombre de rôles à jouer. C’est le cas de la Compagnie de deux lunes dirigée par Maryan Liver proposant deux comédiens en scène lors du festival d’Avignon 2022. De Guiche, en outre était représenté par un immense visage porté par les acteurs devant eux. Il en va de même avec la version du metteur en scène Bastien Ossart pour ses trois comédiennes, produits par le Théâtre Les Pieds nus, lors du festival d’Avignon 2023. Cette fois, De Guiche mais aussi Ragueneau et la duègne se trouvaient représentés par des masques. L’été 2023 est aussi marqué par les propositions de balades théâtrales données au musée Rostand, à Cambo-les-Bains, où la compagnie Irrinigar masque Montfleury dans Cyrano, d’une part, mais aussi les Nocturnes dans Chantecler, d’autre part.

40 Edmond Rostand, Chantecler, op. cit., p. 10-11.

41 Jean Starobinski, L’Œil vivant [1961], Paris, Gallimard, 1999, p. 10.

42 Georges Buraud, Les Masques [1948], Paris, Les Belles Lettres, « Encre Marine », 2014, p. 10. 

43 Edmond Rostand, Chantecler, op. cit., p. 79-80

44 Philippe Bulinge, « L’Héritage de La Samaritaine dans Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand », op. cit., p. 86. 

45 Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, op. cit., p. 100.

46 Philippe Bulinge, « L’Héritage de La Samaritaine dans Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand », op. cit., p. 70.

47 Edmond Rostand, Les Romanesques, op. cit., p. 67.

48 Ibid.

49 Ibid., p. 97.

50 Ibid., p. 68.

51 Madeleine Roussel, Une œuvre ignorée d’Edmond Rostand : La Dernière Nuit de Don Juan, op. cit., p. 174.

52 Yves Moraux, Masques et jeux dans le théâtre comique en France entre 1685 et 1730, Lille, Atelier Reproduction des thèses, 1977, p. 140.

53 Philippe Bulinge, « La Légende picturale napoléonienne dans L’Aiglon d’Edmond Rostand », 2002, http://www.edmond-rostand.com/legende.pdf [en ligne] (consulté en avril 2021), p. 8.

54 Edmond Rostand, L’Aiglon, op. cit., p. 91.

55 Ibid., p. 382.


À propos de lautrice

J’ai fait mes années d’hypokhâgne et de khâgne à Aix-en-Provence. J’ai poursuivi en troisième année de licence à la Sorbonne, Paris IV. De retour à Aix, j’ai passé mon diplôme de master Recherches en littérature. Je me suis alors penchée sur le théâtre de Rostand pour mon mémoire secondaire de deuxième année, tandis que j’étudiais depuis deux ans les romans-jeunesse de Jean-Claude Mourlevat dans le cadre de mes mémoires principaux. J’ai obtenu mon agrégation de Lettres modernes en 2015. Depuis, j’enseigne en lycée sur Avignon, après avoir été titularisée à Montpellier à l’issue de mon stage, où j’ai également obtenu mon master Métiers de l’Enseignement. Après sept ans dans l’enseignement secondaire, j’ai ressenti le besoin et l’envie d’évoluer. J’ai retrouvé Rostand et me suis inscrite en doctorat à Aix-Marseille Université à la rentrée 2021. Je travaille sur le sujet « Quête identitaire, maques et démasquements dans le théâtre d’Edmond Rostand ». Mes recherches m’ont donné l’occasion d’être publiée en 2023 dans la revue Théâtres du Monde, avec un article intitulé « Le corps dans le théâtre d’Edmond Rostand », ainsi que dans la Revue roumaine d’études francophones, avec l’article « Personnages et jeux de rôles dans le théâtre d’Edmond Rostand ».

Continuer la lecture avec l'article suivant du numéro

Le masque au théâtre, entre artifice et vérité ?

Caroline Bach

Un masque est un objet qui cache une partie ou tout le visage humain. Objet utilisé au théâtre, il est un instrument du jeu de l’acteur. C’est ainsi que le masque en scène doit en quelque sorte disparaître en tant qu’objet : il prend vie et devient réel. Le spectateur doit le « reconnaître » en tant que signe de sa propre expérience du réel. Si cette reconnaissance n’a pas lieu, le spectateur ne voit que l’objet et n’arrive pas à...

Lire la suite

Du même auteur

Tous les articles

Aucune autre publication à afficher.